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La qualification juridique des contributions Takaful
13 septembre 2017

Les jurisconsultes reconnaissent à l'unanimité que le Tabarru est un concept noble de la jurisprudence musulmane.

Sa pratique dans l’industrie Takaful soulève cependant une question cruciale car les contributions versées par les participants ne sont pas un don au sens pur, mais plutôt un don conditionnel : chaque participant donne un montant dans l’attente de recevoir en retour un avantage financier futur. En outre, le montant de la donation est ajusté en fonction de la nature du risque à couvrir : plus l'exposition au risque est élevée, plus la contribution est importante. Cela est problématique du point de vue de la Charia car le montant donné en tant que Tabarru est censé être volontaire et non obligatoire.

 

Les termes de Tabarru, et de Hibah sont en principe interchangeables et partagent un sens commun de « donation ». Lorsqu’une personne réalise un acte de Tabarru ou de Hibah, elle le fait de manière totalement désintéressée, sans rechercher quoi que ce soit en retour en faveur de quelqu'un ou pour son propre accomplissement spirituel. Cela a pour conséquence légale qu'une fois que le donateur a effectué son don, la propriété est immédiatement transférée à perpétuité au donataire.

 

Alors que dans un fonds Takaful, le participant règle une contribution pour laquelle l'opérateur et le participant conviennent mutuellement qu’elle sera destinée à couvrir le risque garanti. En cas de réalisation du risque, le fonds Takaful versera une indemnité destinée à couvrir le préjudice, et en cas de non réalisation du risque le participant aura le droit, en fonction du résultat technique, à la redistribution d’une part de l’excédent. La contribution versée dans un fonds Takaful ne peut pas être considérée comme Tabarru ou Hibah, puisque le participant attend une garantie en retour.

 

Étant donné que dans un contrat Takaful, le participant verse essentiellement une contribution dans le but des avantages matériels qu’elle procure et non pas en considération d'avantages spirituels, le Prof. Dr. Md. MA’SUM BILLAH estime que la contribution versée par le participant doit plutôt être considérée comme contribution Musahamah plutôt que comme donation Tabarru.

 

Avec le don Tabarru, la propriété est transférée en considération d'un avantage spirituel pour le donateur alors qu’avec la contribution Musahamah, le contributeur conserve les avantages matériels et légaux de sa contribution.

 

La Musahamah est dans un contrat d'assurance une contrepartie monétaire, versée par le participant en vertu de l’obligation contractuelle qui le contraint à verser une contribution en l’échange de la couverture du risque assuré.

 

La Musahamah n'implique pas nécessairement l'idée de donation, elle ne doit pas forcément être en faveur d’autrui, et peut être réalisée au profit du contributeur lui-même. Dans une Musahamah, le contributeur ne perd pas son droit de bénéficier de sa contribution.

 

Au travers de cette qualification juridique de la contribution en Musahamah, il n’y a plus d’incompatibilité juridique avec la Charia qui ne s’oppose pas à ce que le contributeur puisse en tirer avantage. Grâce à cette qualification juridique, les participants n'ont plus aucune restriction dans la revendication de toute forme d'avantage mutuel sur le fonds auquel ils auront contribué.